Sous le ciel de Paris, le monde formait une œuvre mal conçue. Mais la laideur d’un homme abandonné ne rattrape pas la tristesse de la Seine qui failli de nous diviser. Ils y dansaient, sur les quais et je contemplais, ne sachant ce que je deviendrais, je le voyais, il dansait, peignait ce que je désirais depuis si longtemps. Sous le ciel de Paris, il chantait, j’écoutais. Je ne le voyais que de si loin, mon seul compagnon fut, depuis si longtemps, cette pure velléité et ce rat qui hantait mon Paris attristé. Mais cher amant, me voilà, tu ne me connais pas, mais je déambule, ou pas, sur le pont de Bercy. Mon dieu que tu es joli, ils te traitent de clochard, tu ne leurs laisses aucune place dans ton cœur, c’est Mozart qui conduit le piano en ton cœur. J’y suis presque, sur ta rive, celle où tu gênes les bourgeois et les hypocrites. Je m’approche, tes mouvements troublent ma présence, je le sais. Alors, j’attends, la foule encombre l’amour que je porte pour l’inconnu devant moi, je patiente, qualité qui ne m’appartient pas, je regarde l’horloge mais Notre Dame semble embrasser l’éternité. Voilà que les applaudissements marquent la fin de ta danse, qui est pour moi le début d’une nouvelle transe. Tu t’arrêtes et tends ton chapeau vers le monde, je n’ai plus de pièces, rien qu’un charme pour lequel je doute bien trop pour te l’offrir. Je réfléchis, assez pour manquer ton regard croisant ma présence, voilà que la foule se réduit, tu prépares ton sac et t’en vas. Influencé par mes chansons d’amour, je te cours après, –enchanté, devrais-je chanter pour réussir à vous faire danser ?– ton regard imite celui du rat qui me suit, je regarde autour de moi, mais je ne vois que toi. Je m’assois, j’espère que tu me suivras. J’attends, le rat à côté de moi a volé une branche d’absinthe qu’il a sûrement dérobé à une vieille servante qui pleurait son amant, comme je pleure le fait que tu sois absent. Mais te voilà, tu t’assois, toutefois, je ne parle pas, alors que je pense tellement, à toi, comment te dessiner mes pensées. La foudre a frappé la Tour Eiffel semble-t-il, tu termine donc l’œuvre que forme le ciel, sous lequel je t’ai rencontré. Les yeux au ciel, tu en a pris le bleu pour peindre la nuit, nos mains presque amies, tu en prends la pâleur pour peindre la lune, le chagrin de ton dernier amour, tu en prends les larmes et en fais des étoiles. Je te laisse finir, patient, qualité qui m’appartient auprès de toi, puis je chante un poète dont j’ignore le nom, longtemps, avant que tu ne disparaisses. Je conte ses rimes, sa magie, les sentiments qu’il opprime, son rêve d’un amour bien inconnu, et sans surprise ton oreille attentive me séduit, elle nourrit la puissance de mon amour qui se précipite vers toi, sans aucun détour. C’est une souffrance qui relève de l’ironie, mon magnifique inconnu, maintenant, je l’avoue il y a des choses, petites et grandes, qui me rappellent notre rencontre, je continue de la chanter, ne sachant si tu l’a, oubliée, ou si tu l’a toujours, en ton cœur, lorsque tu penses à Paris, penses-tu à moi ? Tout me rappelle ta danse, et maintenant j’ai le cafard, il me suit. Mais mon cher parisien, je ne te connaissais guère, mais il me semblait que je te devais tous mes étés frivoles, tous mes automnes au long desquelles je m’isole. C’est donc au cœur de Paris, là où nos angoisses se perpétuent et nos amours s’entretuent que nous voyons la vérité que les philosophes d’autrefois recherchaient. Maintenant, prends garde et tiens ma main, découvrons la mer qui se trouve si loin du sinistre spleen parisien, cette mer que j’ai autrefois abandonnée pour être ici. Cette mer qui me protégeait de la mélancolie qui t’entourait. Pourtant, tu le vois, je l’ai abandonnée et bravé ma timidité pour atteindre la douceur de ta beauté. Maintenant, chaque soir, le vin remplace mon venin, et je t’assois sur le banc de mon enfance pour t’écrire l’union entre la douceur et l’amertume d’une nature limitée, qui ne laisse liberté qu’aux souffrances du pardon. Car ma mère ne pouvait me protéger de mes péchés puisqu’elle se noyait dans son ignorance qu’elle essaye, en vain, de répudier. Tu me regardes, tes yeux deviennent des perles, j’ai peur de t’ennuyer, de te perdre, tout cela pour ne pas t’oublier, te revoir danser. J’accepterai tes erreurs pour ne pas avoir à te rechercher, pour ne plus te rencontrer. Ton beau visage esquisse un sourire, tu penses que c’est moi qui vais commettre une erreur, –tu doutes bien assez–, mais où trouverais-je le pouvoir d’arrêter ? C’est mon unique voie vers la vérité, afin de dessiner ma réalité, avec toi. Tes doigts deviennent des couteaux qui menacent la fragilité de ma peau, ils dessinent notre rencontre, tellement mieux que moi, qui le fait depuis des mois. Tu fais de mon corps une œuvre d’art, et tu lui donnes la beauté rien qu’en le regardant, mon amant. Tu fais de moi un poème américain, dans lequel tu me donnes la beauté, dans lequel je disparais si tu couvres tes perles, un poème de Plath, les rimes prennent place à nos côtés, j’ai arrêté de les contrôler. Mais aujourd’hui, ce n’est plus le temps des amours ou de la beauté, il y a une révolution qui se déroule en toi ou en moi, et par peur de nous perdre, la frénésie remplace notre harmonie, un changement soudain qui a détruit la plume avec laquelle j’écrivais ton charme. Seulement nos souvenirs existent, mais nous ne nous en sommes plus les possesseurs, uniquement les damnés auteurs. Mon cher ami, je t’ai perdu, je t’ai détruit mais j’ai gardé ton secret au risque de perdre ma beauté, tu avais raison, mais la chanson qui te faisait danser résonne en moi comme un bourdon persévérant me rappelant que ce n’était pas qu’une chanson.